Une enzyme bactérienne exploite la vitamine C pour contrecarrer l’immunité

0
10

Une étude récemment publiée révèle que la bactérie opportuniste Pseudomonas aeruginosa exploite la vitamine C pour neutraliser un élément clé de la réponse immunitaire humaine, renforçant ainsi sa capacité à provoquer des infections graves. Des chercheurs de l’Université de São Paulo et de la Chan Medical School de l’Université du Massachusetts ont découvert le mécanisme moléculaire par lequel cet agent pathogène se défend contre le stress oxydatif, un élément essentiel de la façon dont l’organisme combat les envahisseurs.

Comment Pseudomonas aeruginosa se défend

Pseudomonas aeruginosa est une bactérie particulièrement dangereuse car elle se développe dans un système immunitaire affaibli, provoquant des infections comme la pneumonie chez les patients atteints de mucoviscidose, des infections des voies urinaires et de graves infections de plaies. Sa résistance aux antibiotiques en fait une cible prioritaire pour de nouveaux traitements, selon l’Organisation mondiale de la santé.

Lorsque le corps détecte une infection, les cellules immunitaires libèrent des espèces réactives de l’oxygène – essentiellement des explosions contrôlées de produits chimiques nocifs – pour tuer les bactéries envahissantes. Toutefois, P. aeruginosa possède des défenses sophistiquées pour contrecarrer cette attaque, notamment une enzyme appelée LsfA, un membre de la famille des peroxirédoxines (Prx6).

La vitamine C comme alliée inattendue

L’étude, publiée dans Redox Biology, détaille comment LsfA utilise la vitamine C (ascorbate) pour détoxifier le peroxyde d’hydrogène, un puissant oxydant libéré par les cellules immunitaires. Cette interaction permet à la bactérie de résister à l’attaque oxydative de l’organisme, renforçant ainsi sa virulence.

“Nous avons démontré que l’ascorbate peut agir comme agent réducteur dans un système cellulaire, ce qui est nouveau”, explique Rogério Luis Aleixo-Silva, chercheur impliqué dans l’étude. L’équipe a également obtenu la première caractérisation structurale d’une enzyme bactérienne Prx6, révélant comment la vitamine C interagit directement avec le site actif de LsfA pour régénérer sa fonction antioxydante.

Implications pour les nouvelles thérapies antibactériennes

Cette découverte remet en question la compréhension conventionnelle du fonctionnement de ces enzymes, suggérant que la vitamine C joue un rôle plus important dans la défense bactérienne qu’on ne le pensait auparavant. Il est important de noter que l’enzyme bactérienne LsfA diffère structurellement de son homologue humain, offrant ainsi une cible potentielle pour de nouveaux médicaments. Les chercheurs ont déjà commencé à utiliser la modélisation informatique pour identifier des composés susceptibles de perturber le fonctionnement de l’enzyme sans nuire aux cellules humaines.

Les prochaines étapes impliquent une enquête plus approfondie sur la façon dont P. aeruginosa métabolise la vitamine C et teste les effets du blocage du LsfA dans des modèles d’infection réalistes. Cette recherche pourrait conduire au développement de nouvelles stratégies antibactériennes exploitant les propres défenses de la bactérie contre elle, offrant ainsi une nouvelle arme dans la lutte contre les infections résistantes aux antibiotiques.